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Géorgie On My Mind – 3 – Autour du mont Kazbek

Mon périple dans les montagnes géorgiennes se poursuit et je n’en ai pas fini avec le tout-terrain. Il me faut déjà sortir des vallées isolées de la Svanétie, la route d’Ushguli me réservant encore quelques surprises avant d’avoir le droit de rejoindre la « Military Road » et le mont Kazbek… Alors gaz !!

Je n’ai jamais aussi bien dormi dans une tente que cette nuit… Il faut dire que j’avais tiré sur la corde lors de l’étape précédente ! Mais je suis débarrassé de la partie la plus difficile et technique de la piste, après ce repos bien mérité il ne me reste plus qu’à profiter des lieux sans pression. Le confort dans ce « Bed&Breakfast » de fortune fût spartiate mais clairement suffisant pour moi. Une douche à l’eau froide dans le jardin, des toilettes rudimentaires et une pièce chauffée pour faire sécher mes affaires… What else ?! J’oubliais le petit-déjeuner copieux avec soupe, omelette, patates… Pour repartir sur de bonnes bases !

 

 

La veille je n’avais pas pu profiter des lieux que je découvre à mon réveil. Tsana est un tout petit hameau quasiment coupé du monde, seule une piste défoncée y accède et le premier vrai village est à plusieurs heures de voiture. Bien sûr l’hiver ses habitants restent coincés ici pendant des mois, mieux vaut avoir fait ses réserves et garder le moral ! J’ai adoré les moments passés avec mes hôtes, prévenants, drôles… Ils témoignent de leur fierté de vivre dans les montagnes svanes, une terre qu’ils ne quitteraient pour rien au monde malgré la rudesse de la vie sur place… Et quand je vois le soleil se lever sur la montagne, avec le drapeau géorgien qui flotte fièrement au vent, je les comprends…

 

 

Si la portion entre Ushguli et Tsana était compliquée, avec un fort dénivelé négatif et des pierres (qui roulent) partout, la suite se présente plutôt bien. En fait je suis dans le fond de la vallée et il ne me reste plus qu’à suivre la rivière, plus de bosses, de trous, ni de « au secours ! » et autres « oh mon dieu ! »… A part de belles portions boueuses je n’ai plus à m’inquiéter, reste le plaisir de flâner sur le chemin en profitant du soleil et de la vue…

 

 

Au final il me faudra 5h30 pour venir à bout des 100 kms de la piste au départ de Mestia, pauses photos comprises, ce qui est une bonne moyenne selon les locaux. Le retour sur le goudron est assez étrange, d’un côté je suis soulagé de m’en être sorti sans blessure ni casse… Mais quelque part je serai bien resté un peu plus longtemps paumé dans les montagnes… La « civilisation » ne me manquait pas du tout ! Du coup je roule à deux à l’heure, pas trop envie de faire de la moto et la tête encore en Svanétie… Le paysage change, bizarrement je me croirais rentré chez moi dans les Cévennes.

 

 

Puis, au détour d’un virage, je fais une rencontre surprenante: une 1200 Ténéré chargée et équipée pour le voyage… Voilà des jours que je n’avais pas croisé une bécane et il faut que je tombe sur le même modèle que la mienne !
On s’arrête tous les deux, aussi surpris l’un que l’autre… Il s’appelle Trevor, australien d’une bonne cinquantaine d’année et qui parcourt le monde depuis 3 ans. En parlant un peu avec lui je finis par me rendre compte qu’il avait posté une demande d’aide mécanique sur le forum Super Ténéré français. Croiser un membre du forum, par hasard, à 4500 kms de la maison… Faut le faire !!
Sa bécane accuse 160000 kms au compteur, pas de panne majeure, et il a l’air toujours ravi de la conduire… On s’attarde longtemps à discuter, il a fait le tour du monde, à plein d’anecdotes à raconter mais débarque juste en Géorgie du coup j’ai aussi quelques conseils à lui donner. Il a entendu parler de la piste qui mène à Ushguli et je lui confirme qu’elle est plutôt… « Technique » ! Après quelques photos souvenirs et échange de mails, nous reprenons le cours de nos aventures chacun de notre côté…

Pour le suivre sur la route (actuellement en Asie): http://www.facebook.com/aroadanywhere

 

 

Une fois arrivé à Kutaisi, une ville digne de ce nom, je m’arrête pour un pique-nique improvisé dans la première supérette que je croise. Chips et glaces, le top de la diététique ! En même temps il n’y a rien d’autre qui me tente… Des jeunes du quartier me rejoignent et me propose de boire un coup avec eux, il est 14h et ils sont déjà ivre mort à la vodka… Je leur explique que je ne bois pas d’alcool, alors je passe un peu pour une tapette d’européen de l’ouest mais on en rigole ! Sans tomber dans le cliché sur les géorgiens, ici on est en quand même assez décomplexé de la picole, c’est à n’importe quelle heure de la journée et pour n’importe quelle occasion… Et, sur la route, rouler avec 3 g dans chaque bras est clairement mieux toléré qu’un tout petit excès de vitesse ! Une autre culture…

Je me trouve un coin de bivouac tranquille dans une pinède, sur les hauteurs de Gori… La ville de naissance de Joseph Djougachvili, alias Staline. A force de slalomer entre les arbres, pour trouver le carré d’herbe parfait pour ma tente, je finis par buter sur une racine qui dépasse et me vautre une nouvelle fois avec la moto… Heureusement personne n’était là pour me voir, l’honneur est sauf ! Il reste quand même à relever les 300 kg de la bête… Encore cette foutu déconcentration de fin de journée !

Le réveil sera compliqué, avec de fortes rafales de vent qui perturbent mon petit-déjeuner et le démontage du camp. En voulant tenir la tente lors d’une bourrasque, je la plaque trop fort au sol et un des arceau casse net ! La journée commence mal, et j’espère que ce ne sera pas trop pénalisant pour la suite du voyage… Il va me falloir trouver un bricolage efficace pour pouvoir continuer à bivouaquer !

La route nationale qui relie Gori à Tbilisi n’a aucun intérêt, c’est moche et le trafic est surchargé… Alors je décide de prendre l’autoroute toute neuve construite à côté. Mieux vaut gagner du temps sur cette étape de liaison. Une fois dans les environs de la capitale je prends la direction du nord et de la Military road. La route porte ce nom car c’est pas là que passèrent les troupes russes lors de l’annexion de la Géorgie au XIXème siècle, et c’est toujours un des accès principal et direct vers la Russie. Malgré le conflit de 2008, la frontière est à nouveau ouverte mais le trafic c’est nettement ralenti, ce qui m’arrange !

Sur mon chemin je croise la très belle citadelle d’Ananuri, lieu photogénique et chargé d’Histoire. Comme Ushguli les fortifications n’ont pas été construite pour faire joli… Ici on a guerroyé, pourfendu, brûlé, démoli, reconstruit, re-démoli… Pendant des lustres… L’Histoire de la Géorgie c’est un peu Game of Thrones, les effluves de vodka en plus !

 

 

Cette route militaire est en excellente état, surement le meilleur bitume de Géorgie ! Je roule à un rythme que j’avais quelque peu oublié avec tous ces virages qui incitent à prendre de l’angle… J’ai même réussi à passer la 6ième, un exploit dans ce pays !

L’itinéraire quitte le fond de la vallée pour les sommets, les panoramas se multiplient et imposent de très nombreuses pauses photos. Je suis dans une région très touristique, il y a de nombreux cars de voyage et ça me fait vraiment bizarre de croiser tout ce monde dans la montagne après la solitude en Svanétie !

 

 

Je traverse même une station de ski, Gudauri, au standard de l’Europe de l’ouest avec des hôtels partout, des restos… Mais je ne suis pas là pour ça, je poursuit vers le col de Jvari (2395 m tout de même…) où la route invite à poncer ses repose-pieds sur le goudron… Sur place un drôle de monument rappelle l’Histoire du pays à travers une frise. Mais l’intérêt reste encore le panorama…

 

 

Au niveau du col les températures sont glaciales… Pas le temps de traîner donc, je file sur Kazbegi pour me trouver un hôtel (mon arceau de tente étant toujours cassé). L’endroit est très beau, au pied du mont Kazbeg (5047 m), et réputé pour la randonnée et les sports outdoor. Il y a beaucoup de monde sur place et finalement tous les hôtels sont bien trop cher pour moi… Il se fait tard, le soleil commence à tomber et le froid arrive… Je reviens finalement sur mes pas, dans la station de Gudauri pour espérer trouver une piaule à un prix raisonnable… Le thermomètre doit frôler le 0, ça commence à piquer et j’espère que je trouverai une auberge sur place !

Après avoir écumer le coin en long et en large, je trouve finalement un hôtel super classe pour même pas 20€. Il est désert et le patron est bien content d’avoir client motard avec qui discuter… C’est assez rare pour lui ! Ça sera l’occasion de réparer ma tente avec du scotch US, faire une lessive et surtout me reposer dans un vrai lit après plusieurs jours intense. Demain j’irai explorer les environs, mais pas avant une bonne nuit de sommeil !

Le lendemain je vais m’accorder une journée « off », un planning à cool sans objectif précis si ce n’est de me faire plaisir et profiter des lieux. Ça commence déjà par une grasse matinée et un départ plus que tardif de l’hôtel ! Puis 40 minutes de moto pour retourner à Kazbegi accompagné d’un grand soleil.

 

 

Je n’ai pas honte de dire que j’ai la flemme de faire de la moto, aujourd’hui je m’autorise tout y compris un bon resto. Apéro, plat, dessert, café… Un truc gargantuesque pour 5€, pourquoi se priver ?! En ville je croise deux 800 GS tchèques intégralement équipées Touratech, puis deux Ktm 1190, mais sans pouvoir trouver les propriétaires… Dommage, j’aurai bien parlé bécane. En tout cas Kazbegi attire les aventuriers !

Je continue ensuite vers la frontière russe, sans but et simplement parce que le cours de la rivière m’inspire…

 

 

La frontière est infranchissable, pour cela j’aurai dû faire une demande de visa… Et puis de toute façon je n’ai pas le temps d’aller en Russie, ce n’est pas le but du voyage. Alors demi-tour et retour à Kazbegi où le mont Kazbek  me fait de l’œil… Le sommet est encore enneigé, ce qui n’est pas étonnant vu que cette montagne est plus haute que notre Mont Blanc ! D’ailleurs on se vante bien d’avoir la plus haute cime d’Europe, mais c’est en fait une erreur car c’est l’altitude la plus élevée d’Europe… De l’ouest seulement. Dans le Caucase il y a 6 montagnes plus hautes que lui, rien que ça…

J’apprends qu’il y a une piste qui mène à l’Eglise de la Sainte Trinité, ce qui semble une bonne idée pour passer l’après-midi… Ou pas !

La piste fait à peine plus de 2 kms, soit rien du tout, mais je suis coincé derrière une horde de 4×4 qui me recouvre de poussière… Je les double avec beaucoup de difficulté car personne ne veut me laisser passer, et quand j’y arrive je me retrouve de toute façon coincé derrière un autre groupe… L’endroit semble être l’attraction des aventuriers du dimanche, une armée d’imbéciles qui louent des 4×4 pour se faire quelques sensations fortes dans les chemins mais qui ne les maîtrisent pas et provoquent des bouchons incroyable sur une piste certes un peu technique… Mais absolument pas compliquée !

Seul ça serait largement jouable, mais en moto il faut du rythme pour ne pas tomber surtout en configuration « voyage » et ces cons prennent un malin plaisir à s’arrêter aux pires endroits sans raison… M’obligeant à stopper la moto en équilibre entre les cailloux, les ornières, le précipice… Ceux que je croisent en sens inverse ne bougent pas d’un poil et manque de m’écraser ou de me pousser hors de la piste… La pression commence à monter

Dans un énième pierrier un 4×4 s’arrête et me force à stopper mon allure à l’endroit le plus instable… Me voila bloqué dans les pierres et la moto refuse de repartir, à force d’entêtement je finis par faire tomber la moto… Je vais pour relever la bête quand la voiture en face de moi, que je bloque forcément, me klaxonne pour m’ordonner de me dépêcher !!! Là je ne tiens plus et balance mon casque dans sa direction, l’insultant de tous les noms et dans toutes les langues… Je ne peux pas hurler plus fort, et vu ma gueule de psychopathe le pépère géorgien s’enferme dans sa voiture, la peur dans les yeux… Ça jette un froid, plus personne n’ose bouger et ça m’arrange bien que ces abrutis ferment leurs gueules… Un groupe de randonneurs sympas viennent m’aider pour faire demi-tour, 45 minutes pour faire un kilomètre et manquer de mourir à chaque croisement… C’est trop pour mes nerfs, et de toute façon dans ces conditions je ne prends pas de plaisir…

C’est la plus grosse déception du voyage, je n’aurai pas vu le magnifique panorama de l’église sur Kazbegi… Mais tant pis, le jeu n’en vaut clairement pas la chandelle.

Pour me consoler je prends la direction de Juta, une vallée isolée à l’est de Kazbegi, et je reprends du plaisir à conduire ma moto ! Enfin seul, à profiter du paysage et de la piste à mon rythme… Les lieux sont magnifiques, c’est l’idée que je me faisait de ces hautes montagnes du Caucase

 

 

Puis, tout au fond de la vallée, le village de Juta s’offre à moi… Un coin perdu comme je les aime, authentique, calme… Il y a bien un camping sur place mais inaccessible avec ma moto, il faut donc repartir sur mes pas (la vallée est une impasse) pour trouver un spot pour bivouaquer.

 

 

C’est chose faite à Sno, un minuscule village où je vais camper sur un terrain de foot (apparemment) abandonné. Je profite du coucher de soleil sur la montagne en compagnie de quelques vaches, enfin au calme après une journée éreintante… Et dire qu’à la base ça devait être une étape cool !

 

 

 

 

 

4 réflexions au sujet de « Géorgie On My Mind – 3 – Autour du mont Kazbek »

  1. Marc Ferreol dit :

    Toujours aussi bon de vous lire.

    Je n’ai pas trouver pour partager sur FB depuis le blog, alors je vais passer par FB ou pour Vie de Motard.

    Répondre
    • xt1200z dit :

      Merci ! 😉 C’est le but d’un blog, partager nos expériences… Et tu aussi le faire sur ma page facebook 😉

      Répondre
  2. herubel dit :

    C’est bien ce que je pensais, rouleur, conteur, shooteur,ça donne envie …!!

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  3. Drix dit :

    J’imagine bien la scène avec le 4*4 qui te klaxonne avant de s’enfermer de peur dans son véhicule.

    Sur le coup tu n’as pas du trouver ça drôle mais aujourd’hui je suis sûr que tu en rigole 😂

     

    En France ou ailleurs les boîtes à roues sont incorrigibles 🤣

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